C’est sur la dialectique entre conflits et coopération qu’Eau de Paris a proposé d’étudier lors du 9ème Atelier des Métamorphoses « Conflits d’eau, enjeux de pouvoir : de la géopolitique au dialogue territorial », en interrogeant des approches empiriques et hydrodiplomatiques pour anticiper et réguler ce type de tensions.
Contestations citoyennes contre les mégabassines, contre les prélèvements des minéraliers dans les nappes phréatiques, contre les usines de fabrication de microprocesseurs nouvellement implantées à Grenoble pour s’affranchir des perturbations de l’approvisionnement mondial en puces électroniques, elles-mêmes liées aux sécheresses intenses à Taïwan, guerre en Ukraine qui repose la question de nos souverainetés énergétiques et économiques… Ces deux dernières années ont marqué un tournant majeur dans la perception du rôle de l’eau dans la société.
On découvre en effet que la question de l’eau ne se résume pas à l’hydrologie. Dans un contexte géopolitique bouleversé, elle renvoie à des questions politiques et à des choix socioéconomiques de moyen, long et très long termes au moment même où la France doit opérer un virage stratégique de décarbonation de son économie, de réimplantation de son industrie et de relocalisation de l’eau virtuelle. Elle renvoie à des enjeux de partage de la ressource hydrique à l’aune de l’accélération des effets du changement climatique. Elle renvoie in fine à des enjeux d’acceptation sociale et des enjeux de pouvoir, qui nécessitent des arbitrages fins.
Si la France enregistre depuis plus d’un an des conflits d’usages liés à l’eau, ceux-ci ne sont pas nouveaux dans le monde. Mais en aucun cas ils ne constituent des guerres de l’eau. Parce que l’eau force systématiquement au dialogue et à la coopération territoriale entre les acteurs.
Les intervenants
- Emma Haziza est hydrologue. Référente médiatique et chroniqueuse sur France Info dans « un degré de conscience », elle participe notamment à la formation des cadres de l’administration centrale française aux enjeux hydrologiques. Conférencière, elle intervient dans les grandes écoles et auprès de divers publics via des conférences inspirantes sur la lecture actuelle de la situation climatique en France et dans le monde
- Julie Trottier est directrice de recherche au CNRS et enseigne à Sciences Po Paris. Elle étudie la construction sociale et politique du discours scientifique sur l’eau ainsi que des choix technologiques associés. Spécialiste de la question de l’eau en Israël et Palestine, elle a dirigé des projets de recherche sur la « tenure » de l’eau dans plusieurs pays, financés par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et par l’Association Française de Développement (AFD).
- Fadi Comair est ingénieur des Ponts et Chaussées, diplomate de l’eau à l’American Academy of Water. Père du concept de l’hydrodiplomatie (1990), il est depuis 2019 président puis vice-président du Programme Hydrologique Intergouvernemental (PHI) de l’UNESCO. Il est également président honoraire du réseau méditerranéen des organismes de bassin (REMOB 2009-2011) et vice-président du Système Euro-Med pour l’information aux métiers de l’eau (SEMIDE).